Rapport ITF
Gérer la transition vers un transport routier de marchandises sans conducteur

Innovation, Transport

Gérer la transition vers l'automatisation dans le transport routier français

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Le camion autonome n'est plus pour demain, il est déjà là ! Seule demeure la question de sa vitesse d'introduction sur nos routes.

C'est dans ce contexte que les acteurs du transport routier au niveau mondial, comprenant les fédérations professionnelles (IRU), les organisations syndicales (ETF) et l'industrie manufacturière automobile (ACEA), ont, sous l'égide du Forum International du Transport (héritier de la Conférence européenne des ministres des transports), mené en 2017-2018 un travail conjoint de réflexion sur les conséquences économiques et sociales de l'apparition progressive de l'automatisation dans le transport routier de marchandises.

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L'étude anticipe sur les conséquences dans le futur de l'introduction du camion autonome. Elle repose sur une analyse par scénarios alternatifs pour lesquels sont explorées en détail chacune des conséquences.

Intitulée Gérer la transition vers un transport routier de marchandises sans conducteur[1], elle fait des recommandations aux pouvoirs publics ainsi qu'aux entreprises afin d'optimiser l'arrivée de ces camions ultramodernes tout en limitant les risques sociaux engendrés.

Les principaux enseignements à tirer de cette étude sont les suivants :

  • Il est tout à fait envisageable de voir des camions autonomes sillonner nos routes dans les dix prochaines années.
  • Cette innovation s'inscrit dans un contexte particulier, la Profession en Europe et aux Etats-Unis estime que, sans évolution technologique majeure, le nombre de postes non pourvus de conducteurs routiers professionnels s'élèverait à 800000 à l'horizon 2030.
  • L'introduction du camion autonome bouleverserait ce schéma pour aboutir à une situation dans laquelle 2 millions de conducteurs seraient appelés à voir leur métier évoluer.

C'est la raison pour laquelle le rapport souligne l'enjeu d'une transition réfléchie en amont, accompagnée en douceur ainsi que la hausse des besoins en formation professionnelle, afin d'assurer une reconversion pour les uns, une mise à jour des compétences (digitales notamment) pour les autres.

  • L'introduction du camion autonome dans l'offre de service de transport requiert l'implication d'une multiplicité conjointe d'acteurs clés dont la collaboration sera fondamentale :
    • pouvoirs publics (régionaux, nationaux, européens voire supranationaux
    • fédérations professionnelles
    • organisations syndicales
    • conducteurs, constructeurs automobiles
  • L'arrivée du camion autonome est une quasi-certitude qui appelle une réflexion sur le métier de conducteur. De nouvelles fonctions de support au camion autonome sont envisagées (par exemple: mise en place de centres de commandement/exploitation sédentaires assistant la flotte de véhicules autonomes).
  • Le rapport de janvier 2017 du Comité d'Orientation de l'emploi (COE) sur les impacts sur l'emploi de la numérisation et de l'automatisation estime que ces innovations transformeront cinq fois plus d'emplois qu'elles n'en détruiront.

Ce qui est en jeu ici ce n'est donc pas le nombre de postes de conducteurs de camions qui seront supprimés par l'arrivée du camion autonome, mais l'organisation et l'évolution des compétences des conducteurs déjà en place et l'accueil de nouveaux arrivants.

Les métiers du transport, et au premier chef la conduite routière, sont appelés à évoluer car les entreprises devront s'organiser différemment pour s'adapter aux innovations. Or, toute évolution du métier suppose des connaissances et aptitudes différentes à mobiliser et donc à acquérir. La formation professionnelle aux métiers du transport est donc aussi appelée à s'enrichir en se diversifiant et en innovant.

L'étude fournit quatre séries de recommandations visant à :

  • Mener des projets pilotes et études destinées à tester à la fois les véhicules autonomes, les infrastructures routières et les réseaux de communication connectée, afin de réduire les coûts de recherche et développement industriels.
  • Mettre au point des normes internationales communes ainsi qu'un cadre réglementaire convergent afin de fluidifier les opérations de transport international.
  • Établir, pour une durée limitée, une gouvernance multilatérale du secteur par laquelle les gouvernements pourraient instituer une sorte de conseil consultatif de transition où siégeraient Etats, partenaires sociaux et constructeurs automobiles. Ce conseil fournirait des avis aux Etats sur la politique
  • Instaurer un système de « permis » (payant) que les Etats pourraient accorder aux opérateurs de transport afin de contrôler et de réguler le recours initial au camion autonome pour étaler dans le temps les adaptations sociales nécessaires.

La prochaine lettre mensuelle du Lab Transport proposera la synthèse d'une étude menée en 2018 par le Ministère de la transition écologique et solidaire et traitant des principales ruptures technologiques, comportementales et économiques affectant la mobilité des personnes et des marchandises aux horizons 2030-2050 et 2070.


[1]Managing the Transition to Driverless Road Freight Transport