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Demain, la ville logistique

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La logistique urbaine est en révolution constante, d'autant plus marquée depuis la crise Covid-19 avec l’expansion significative du e-commerce. La densité urbaine est grandissante et les consommateurs exigent des services croissant à proximité de leurs lieux de vie.

 

 

L’arrivée des nouveaux acteurs (plateformes digitales) a démultiplié les canaux de distribution, l'évaluation des prestations par les consommateurs et la compréhension des enjeux logistiques par les acteurs publics. Ces derniers se structurent désormais pour intégrer l'approche logistique dans le temps, pour des villes à la fois durables et efficaces.

 

L'AFT vous proposer une synthèse de scénarios possibles, selon les tailles de ville, les acteurs des acteurs et surtout les comportements de consommation  à venir…

      1. Contexte

L’évolution de la logistique urbaine est au cœur de nombreuses réflexions, et dans tous les pays du monde. Toutes les tendances chiffrées le montrent : le nombre de colis à livrer à explosé en milieu urbain, notamment depuis la crise Covid-19 avec l’expansion significative du e-commerce. La densité urbaine augmente elle aussi un peu partout dans le monde, souvent synonyme de plus de services, plus d’accès à l’éducation, à l’emploi et au confort. On parle de « ville du quart d’heure » pour que les citoyens aient accès à un maximum de service dans une proximité immédiate. Les acteurs du transport voient également dans la concentration des flux, un outil leur permettant de rationaliser leurs opérations et d’obtenir une meilleure rentabilité que lorsque les points de livraison sont distants les uns des autres.

Mais est-ce réellement le cas ? Cette concentration des flux entraîne-t-elle suffisamment d’optimisation des chargements, des tournées et permet-elle de gérer le personnel dans les meilleures conditions ?

L’arrivée des nouveaux acteurs (plateformes digitales) a redistribué les cartes en matière de protection sociale (cf. crises à répétition des modèles Amazon, JustEat, etc.), en termes de moyens d’accéder aux consommateurs finaux et en termes d’unités logistiques. Ces changements impliquent une vraie compréhension des enjeux logistiques en milieu urbain par les autorités comme les citoyens, pour structurer dans le temps des villes à la fois durables et efficaces.

Plusieurs scénarios semblent possibles selon les sources et les acteurs, mais il reste encore à voir s’ils sont adaptés à toutes les tailles de ville, à tous les acteurs et surtout aux comportements de consommation d’avenir…

 

      2. Synthèse AFT

Selon les sources et les travaux réalisés, les scénarios qui semblent se présenter, a minima pour les villes à urbanisation française, sont fondés sur des concepts toujours assez proches. Parmi les scénarios que nous avons identifiés :

  • Les évolutions technologiques, relativement attrayant pour son côté innovation et futuriste, notamment auprès des consommateurs
  • La réorganisation des modèles de distribution en place, au sein de chaque type de transport, pour répondre à une demande toujours croissante et pour laquelle tous les modes doivent coexister
  • La loi du marché, qui peut également amener à des changements conséquents en fonction des leaders économiques sur le segment de la distribution, ou même des donneurs d’ordre et l’évolution de leur stratégie marketing
  • Les approches concertées, transversales à toutes les composantes de la ville, depuis les industriels jusqu’aux consommateurs finaux, en passant par les autorités publiques et les acteurs de la distribution bien sûr.

Analysons ainsi les avantages et inconvénients que semblent apporter ces différents scénarios :

L’évolution des technologies

Comme pour toute industrie et modèle économique, les améliorations de nos outils peuvent amener des améliorations de rendement ou de rentabilité. Pour la logistique urbaine, l’énoncé de départ est particulièrement complexe mais amène en même temps une multitude de possibilités et d’espace pour les innovateurs : on parle déjà de « smart city ». Depuis la détection de places de livraison non occupées aux drones, en passant par les casiers intelligents de collecte de colis au sein des résidences, les solutions sont relativement nombreuses.

Toutes ces améliorations vont concerner les opérateurs de transport ou les consommateurs et nécessitent une implication forte, souvent coûteuse, des pouvoirs publics. Non seulement pour la mise en place de tous les prérequis mais également ensuite pour les imposer aux différents acteurs, assurer un usage équitable pour tous les modes et un bénéfice réel, tant pour les consommateurs que les utilisateurs du modèle urbain.

Le déploiement de ces solutions est probablement la partie la plus difficile, puisque pour toute innovation, la mise à l’échelle peut rencontrer quelques obstacles. De plus, tous les acteurs n’ont pas nécessairement les mêmes besoins ou enjeux face aux améliorations apportées (ex. : la cyclo-logistique pour la problématique des espaces de livraison).

La réorganisation des modèles

Beaucoup de prestataires logistiques prônent depuis plusieurs années la mutualisation des opérations et des équipements car elle va apporter à la fois une amélioration des rendements, des coûts de fonctionnement et une capacité de réponse plus grande à la demande. Cela nécessite alors un partage des données, des pratiques, parfois même des procédures internes de travail.

Pour ceux qui ont la capacité d’investir pour repenser leur modèle, voire remplacer leur flotte et leurs modalités de livraison, c’est évidemment plus facile et rapide. Mais peut-on alors parler de mutualisation ? Il peut s’agir de rachat ou de diversification de l’offre logistique en milieu urbain, mais qui devra faire face ,dans tous les cas, à une concurrence qui reste très forte entre les différents modes et pour laquelle il n’existe, à ce jour, pas de contraintes administratives.

On le constate ainsi déjà, cette mutualisation et ce partage de pratiques restent très complexes dans les faits et peu d’acteurs sont enclins à faciliter cette transition s’il n’y a pas un bénéfice immédiat et visible.

La loi du marché

Les « grands » acteurs économiques d’un marché ont souvent un impact important sur ses règles et sur les modes de fonctionnement. L’arrivée d’Amazon a bouleversé certains codes, notamment ceux des délais de livraison, les plateformes numériques ont touché à la protection sociale des salariés, et Google se penche sur la question des outils digitaux. D’ici quelques années il est donc possible que les géants du GAFAM puissent reformater le marché de la distribution du dernier kilomètre, au travers de leurs technologies mais également de leurs financements ou rachats.

Le risque cependant c’est de trop centraliser les approches de la distribution et les résumer à « quelques modèles », tandis qu’une certaine diversité peut apporter plus de solutions. Surtout dans un modèle urbain où les populations sont particulièrement concentrées, avec des rythmes et usages de la mobilité très distincts.

Les approches concertées

Les pouvoirs publics se sont réellement emparé du sujet de la logistique urbaine depuis plusieurs années maintenant, notamment dans les grandes métropoles. On assiste à de nombreuses initiatives, des groupes de travail, la concertation autour des enjeux de chacun des acteurs de la ville. Ces échanges prennent du temps, nécessitent de l’écoute et la compréhension des paramètres des toutes les parties pour que chacun puisse continuer à évoluer dans l’environnement donné.

Cette pratique, pour autant qu’elle parvienne à mettre d’accord toutes les entités représentées autour de la table, demande beaucoup de temps pour arriver au consensus ou la prise de décision par les autorités de règlementer. Les marchés évoluent cependant très rapidement et s’imposent au modèle urbain. Consommation des nouvelles générations, modalités et rapidité de livraison… Il faut donc trouver une manière d’accélérer le processus décisionnel qui découle de ces travaux.

 

      3. Perspectives pour la logistique

Sans surprise, l’avenir des villes sera très probablement une combinaison de tous ces scénarios. Il est un paramètre autour duquel nos sociétés ont de moins en moins de choix que de devoir s’y contraindre : l’environnement global des Supply Chain. Même si l’enjeu stratégique des marchés se trouve dans la ville, l’acheminement des matières premières et de l’énergie se fait sur des distances bien plus grandes et souvent internationales. Ce n’est donc pas juste une question de technologie, ou de statut social, mais de durabilité du modèle dans son ensemble.

Les acteurs de la logistique sont le pivot de la flexibilité des chaînes d’approvisionnement et doivent faire de leur capacité à s’adapter probablement le nouveau modèle de nos sociétés. Faire davantage, avec moins de ressources et de moyens. Probablement même qu’en plus de nouveaux outils et de nouvelles pratiques à intégrer, c’est aussi l’assimilation des nouveaux acteurs en dehors de la chaîne d’approvisionnement qui rendra nos villes plus performantes et durables demain.

En effet, la gestion des espaces de livraison et des véhicules doit être optimisée, pour des flux de plus en plus importants. Il est plus facile d’agir sur l’offre de service que sur la demande (comportements individuels de consommation). Augmenter la capacité de livraison du fret sans tenir compte des besoins de mobilité individuelle, même au travers de transports collectifs, est impossible.

Les start-up logistiques existent, les acteurs de la low-tech s’intègrent également dans le paysage urbain. Les solutions de durabilité existent donc déjà mais c’est la coordination de l’ensemble des acteurs, avec une transition qui permettra à tous de continuer à exister demain et notamment avec les pouvoirs publics, qu’il faut synchroniser avec le marché. Peut-être que l’influence et le plaidoyer de ces professionnels gagnerait à être encore plus marqué auprès du grand public ?

 

Définitions :

Smart city : une « ville intelligente » utilise les technologies de l'information et de la communication pour améliorer la qualité des services urbains ou réduire leurs coûts.

GAFAM : acronyme des géants du Web (Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft) qui sont les cinq grandes firmes américaines qui dominent le marché du numérique.

Low tech : catégorie de produits, services, procédés ou autres systèmes permettant, via une transformation technique, organisationnelle et culturelle, le développement de nouveaux modèles de société intégrant dans leurs principes fondamentaux les exigences de durabilité et de résilience collective.

 

Sources

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