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Les carburants aéronautiques durables

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Le saviez-vous ? Le secteur aéronautique est également très mobilisé par le développement durable et recherche des solutions pour faire évoluer ses technologies, ses carburants... et devenir tout aussi "green" que possible pour préserver non seulement un modèle économique mais surtout une mobilité internationale particulièrement efficace, tant pour les individus que pour le fret en contexte d'urgence.

L'AFT vous propose dans cette note de synthèse de faire le point sur ce qui existe, les technologies qui semblent prometteuses et où nous en sommes en termes de mise en oeuvre. 

1. Contexte

Depuis près d’une décennie, le secteur aéronautique a été mis en face d’une problématique majeure : l’impact environnemental inné à son fonctionnement, avec l’usage du kérosène. D’après les statistiques mondiales rapportées par l’Agence Internationale des Energies (AIE), le secteur aérien représente environ 11,6% des émissions de CO2 dans le monde chaque années, soit environ 952 millions de tonnes.

Dans le secteur transport & logistique, et sans opposer ces modes de transport puisqu’ils se complètent sur des objectifs très distincts, on peut comparer le coût « à la tonne kilométrique » que consomment les différents modes :

            Maritime :                       10g de CO2 / tonne kilométrique transportée

            Routier :                        100g de CO2 / tonne kilométrique transportée

            Aérien :                       1000g de CO2 / tonne kilométrique transportée

Contrairement aux autres secteurs, soit déjà considérés comme plus vertueux (maritime, fluvial), soit avec des possibilités d’évolutions technologiques rapides (comme le routier en particulier), les acteurs de l’aérien ont longtemps cru qu’il serait impossible de substituer ses énergies fossiles par de nouvelles, et reste régulièrement pointé du doigt.

Or, les technologies ont évolué. Il existe non seulement de nouveaux carburants mais de nouveaux types d’appareils en test, et la crise covid a frappé de plein fouet cette filière au point qu’il est critique de saisir l’opportunité d’avoir ses appareils au sol pour rebondir efficacement au sortir de la pandémie.

Entre état des lieux, perspectives, et cas concrets que les compagnies aériennes ont mis en place pour faire avancer toute la filière vers des transports aériens plus vertueux, l’AFT vous propose une petite synthèse pour y voir un peu plus clair.

 

2. Synthèse AFT

Les nouveaux appareils

Tout d’abord, comme pour n’importe quel mode de transport, il y a l’évolution technologique des appareils. L’objectif est double : accueillir toujours davantage de passagers et réduire la consommation et les émissions de carburant à chaque nouvelle génération.

Leur capacité à mieux consommer le kérosène a permis de gagner en autonomie de vol et ce avec une capacité de chargement (passagers ou fret) de plus en plus importante. Les constructeurs (Airbus, Boeing…) s’intéressent également au cycle de vie complet des appareils, pour réduire l’empreinte environnementale dès la conception. L’usage de matériaux composites a fortement augmenté pour représenter près de 50% du fuselage de certains appareils, contre 5% dans les années 1960.

L’utilisation des dispositifs d’internet des objets (IoT – Internet of Things) joue également un rôle important puisqu’au-delà d’améliorer l’expérience des passagers ils apportent une lecture de grandes données qui améliorent l’efficacité des appareils. Meilleure lisibilité des trajectoires entre les avions, calcul de trajectoires optimales, alertes sur les conditions météorologiques et le tout en temps réel pour le pilote et son équipage.

 

Les biocarburants

Les biocarburants sont ainsi une nouvelle étape mais pas la seule, qui vient contribuer à l’amélioration continue de l’empreinte environnementale des appareils aériens. Etant donné que nous nous sommes habitués à ce mode de transport et que la réduction des durées pour traverser la planète ont significativement amélioré les échanges internationaux ou la communication entre les continents, l’objectif est de pérenniser ce mode et le renforcer pour répondre à la demande grandissante.

Pour cela, la réduction voire suppression totale des émissions de gaz à effet de serre reste un objectif ultime. Et les compagnies aériennes semblent en passe d’y parvenir puisque les premiers biocarburants testés en vol datent de 2008, dans des proportions de plus en plus importantes chaque année. Le problème, c’est qu’aujourd’hui seuls 0,06% des vols utilisent aujourd’hui cette ressource.

Les raisons de la difficulté à substituer les nouveaux carburants au kérosène sont simples :

  • Résistance aux variations extrêmes (température, pression)
  • Compatibilité avec les moteurs et équipements existants du parc
  • Disponibilité dans les points d’avitaillement partout dans le monde

 

Malgré cela on recense tout de même déjà 3 générations de biocarburants qui se sont avérés compatibles avec un usage en vol :

  1. Première génération – huiles végétales hydrotraitées

Il s’agit d’exploiter les huiles végétales issues de l’agriculture pour produire des hydrocarbures. Déjà produits à l’échelle industrielle mais en concurrence avec les cultures alimentaires.

  1. Deuxième génération – biomasse

Fabriqué à partir de biomasse lignocellulosique (résidus de bois, paille de céréales, déchets forestiers) et certifié en mélange à 50% depuis 2009. Moins coûteux à produire, ressources plus vaste que la première génération, mais les unités de conversion biomasse en liquide sont en revanche très chères.

 

3. Troisième génération – algocarburants

Dérivé de l’exploitation des algues, ce carburant serait très prometteur pour envisager des vols neutres en émissions de CO2. Les algues rejetteraient autant de dioxines qu’elles en absorbent durant leur développement.

Les deux premiers ont été critiqués par les organisations non gouvernementales, de part l’accentuation de la déforestation et exploitation des sols, et donc un impact à moyen/long terme tout aussi dévastateur que l’usage des carburants fossiles.

 

Les investissements nécessaires

A ce stade, les technologies pour exploiter le biocarburant mais également le produire, le stocker et le prépositionner partout sur la planète afin de ravitailler tous les appareils est en train de se mettre en place. Mais cela demande un budget considérable et un investissement fort des autorités aux côtés des constructeurs.

D’après les experts de la filière aéronautique, les biocarburants pourraient représenter 45% de la consommation mondiale en 2050, mais il faut pour cela réduire le coût de production. Dernier obstacle du développement et utilisation massive face au kérosène, il représenterait entre 3 et 10 fois le coût d’exploitation du kérosène à ce jour, puisqu’aucune production de masse des biocarburants n’a été lancée.

De leurs côté, les gouvernements ont bien compris l’urgence et la criticité de développer une filière dédiée à la production et l’approvisionnement de ces carburants alternatifs. Les études se succèdent depuis quelques années pour favoriser le développement de la Recherche et Développement, diversifier les filières et renforcer les circuits de distribution.

Un Régime de Compensation et de Réduction de Carbone pour l’Aviation Internationale (CORSIA) a été mis en place au niveau mondial pour mesurer les émissions de CO2 des vols internationaux et obliger les exploitants à compenser leur impact en rachetant des crédits carbone (2016). Il reposait alors uniquement sur les vols internationaux et le volontariat.

Mais c’est à partir de ce régime que IATA (Association Internationale du Transport Aérien) a mis en place fin 2020 l’Aviation Carbon Exchange (ACE), qui montre la volonté des opérateurs aériens de participer à cet effort global, racheter des crédits et investir dans des actions de compensation de leurs impacts sur l’environnement.

 

3. Perspectives pour la logistique du fret aérien

Il reste encore beaucoup à faire et développer donc pour pérenniser les activités aériennes et assurer d’un impact carbone maîtrisé voire totalement neutre. Pour les opérations logistiques et notamment le fret aérien, il s’agit aujourd’hui d’exploiter au mieux tout ce qui permettra aux opérateurs logistiques de préserver leur compétitivité (les trajets aériens étant les plus rapides à l’échelle internationale sur n’importe quel autre mode) tout en limitant l’empreinte de l’organisation et en investissant progressivement dans la conversion technologique et énergétique du parc utilisé.

Qu’un opérateur possède un parc d’aéronefs en propre (ex. : Fedex, UPS, DHL, etc.) ou qu’il sous-traite ces opérations à d’autres, des solutions existent pour optimiser les flux et s’assurer que non seulement le fret transite par le mode le plus approprié (éviter l’aérien pour un approvisionnement non critique / urgent) mais que le circuit d’acheminement est bien optimisé en termes d’impact et pas seulement de coût.

Ainsi, parmi les constats de la filière sur l’impact environnemental, utiliser un vol direct plutôt qu’avec escale engendrera un surcoût pour avoir la primeur d’accès à l’espace en soute, mais évitera un double décollage/atterrissage, dont l’impact est le plus fort en termes d’émissions de CO2.

De même, la compréhension globale de la Supply Chain et du cycle de vie des produits permet de repenser le volume des pièces qui transitent à l’échelle internationale, avant l’assemblage et la mise en vente au point de distribution final. Le choix des sites de fabrication et d’assemblage permet de limiter le fret aérien pour des produits volumineux là où il sera moins coûteux et impactant de produire localement les éléments de finalisation d’un produit.

Enfin, la filière logistique, dans son objectif d’optimisation des coûts et de l’efficacité des opérations d’une Supply Chain, n’est pas naturellement prône à investir dans la Recherche et le Développement, mais sait exploiter en revanche les résultats des avancées technologiques de tout secteur qui y travaille. Il s’agira donc pour les logisticiens de saisir dès que possible les innovations à venir et les valoriser auprès du marché avec l’équipe commerciale et la direction.

 

Sources

 

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